En remontant le bel et riant vallon des Verrairiers, depuis la vallée de la Gordolasque, on gagne, au gré du torrent qui le descend, des arpents que l’altitude peu à peu désole. Bientôt, les mélèzes et les pins cembro abandonnent la partie. Plus loin, quelques bosquets de rhododendrons et de genévrier résistent encore. Mais ce n’est que pour renoncer un peu plus haut. On accède alors à un cirque à l’austérité inquiétante, comme creusé au pied d’un passage menant vers l’autre monde. Là-haut vit le Diable… Comment va-t-il ? Hélas, nous ne saurions le dire avec certitude. Mais il est à craindre qu’il soit en ce moment d’une humeur désastreuse. Car il a mis, dans les roues qui nous menaient à lui, tant de bâtons fourchus qu’il est impossible de n’y voir pas là quelque signe d’une dépression saisonnière. Jugez plutôt : un petit café chez Marion et Gabriel avant de partir (alors que d’habitude, c’est “départ immédiat” et on n’traîne pas derrière s’il vous plaît), une allure tranquille et un pas débonnaire en montant (alors que d’habitude c’est au pas de course, et les doigts dans l’nez encore…) , un petit coup de fatigue par ci, une gros coup de barre par là (alors que d’habitude c’est plutôt : “Comment ? on a déjà fini d’monter ?”) et nous n’avons qu’à peine franchi le pas du Trem avant de devoir redescendre, sous peine de finir à la nuit (alors que d’habitude, à midi on est en bas). Mais Diable… que c’était beau, là-haut !